Juste récompense, le prix Nobel de physique 2006 vient d'être décerné aux chercheurs Américains John C. Mather et George F. Smoot pour leurs travaux sur la théorie de l'origine de l'univers et du Big Bang. Or, on le sait, ce moment crucial de la naissance de l'Univers suscite beaucoup de curiosité, un mélange d'admiration et de spéculations libres... dont peu sont fondées !!

Le fait que le terme Big Bang ou "gros boum" (initialement inventé par Fred Hoyle pour tourner en dérision cette théorie) soit mal choisi y est pour beaucoup. Le physicien et épistémologue Jean-Marc Lévy-Leblond n'en finit plus de souligner les méfaits de ce terme imagé et des mauvaises représentations qu'il véhicule, alors même qu'un terme plus neutre ("naissance de l'univers") n'induirait pas tant en erreur[1].

Le comble a sûrement été atteint aujourd'hui par cette dépêche AFP, reprise dans l'article du Monde, qui explique :

Selon la théorie du Big Bang, le cosmos s'est formé il y a environ 13,7 milliards d'années après une gigantesque explosion.

Et le lecteur d'imaginer une explosion se produisant à  un instant "t" (donc avec un "avant"), dans un espace vide, et faisant un bruit sans doute incroyable. Or comme le raconte Lévy-Leblond dans La pierre de touche :

le "big bang" ne se détecte que par ses ondes électromagnétiques (il ne fait pas de bruit) et, surtout, il n'est en aucun cas localisé dans l'espace, qui reste homogène pendant toute l'expansion de l'univers, et sa temporalité même est susceptible d'interprétations plus subtiles que de coutume (on peut à  la fois penser que l'univers "a 10 milliards d'années" et "a toujours existé" — à  condition d'abandonner une certaine naïveté épistémologique). (p. 241)

Les médiateurs des sciences (vulgarisateurs, journalistes scientifiques etc.) ont encore de beaux jours devant eux...

Notes

[1] Mais aurait-il autant de succès ? On peut se poser la question...