Alors que des groupes de citoyens mobilisent et bloguent sur des questions de science — des brevets à  la santé publique et au développement de médicaments —, il est temps de reconsidérer les règles fondamentales du débat public sur la science.

Ouah ! Et ce n'est pas moi qui le dis mais Patrick L. Taylor de la Harvard Medical School (Boston), dans un article paru la semaine dernière dans Nature. Je serais presque gêné que les blogs soient mis autant sur le devant de la scène, alors que cette mobilisation citoyenne sur la science n'est pas récente, mais il n'en reste pas moins que l'auteur voit juste : aujourd'hui, les débats citoyens ne s'arrêtent plus à  la surface, ils plongent dans les arcanes de la science et n'hésitent pas à  rentrer au laboratoire (témoin l'intention du gouvernement singapourien de mener, avant la fin de l'année, des consultations sur le don d'ovocytes).

C'est une idée radicalement nouvelle qui commence à  s'immiscer dans l'esprit des scientifiques (et, je l'espère, des lecteurs de ce blog), réticents malgré tout à  voir la démocratie participative remplacer la démocratie représentative sur ces questions. Mais que faire quand elles deviennent autant prégnantes dans l'arène publique ? Faire la politique de l'autruche et continuer comme avant ? Taylor reprend bien les travaux de Sheila Jasanoff qui a montré sur les biotechnologies que quand l'expression citoyenne n'est pas encadrée formellement, elle emprunte des chemins de traverse : choix de consommation, structures politiques alternatives comme les mouvements écologiques, désobéissance civile, etc. La question n'est donc pas de savoir si l'engagement citoyen peut avoir lieu mais sous quelles formes, comment, avec qui...

Quelle que soit la forme choisie (et nul doute que plusieurs devront cohabiter) Patrick Taylor formule quatre recommandations :

  • il ne s'agit pas simplement de demander à  un échantillons de citoyens si telle ou telle décision est la bonne mais d'engager avec eux un "dialogue informé". Dans le même numéro de Nature, un rappel de l'expérience de Colmar sur laquelle je reviendrai fait la preuve que c'est possible et que ça marche ;
  • il faut plus d'imagination et d'anticipation sur le monde que préparent les technologies d'aujourd'hui, avec la participation active des citoyens (blogueurs ou non) ;
  • il faut plus de transparence dans le processus scientifique et ceux qui le font pour augmenter la confiance dans les comités d'expertise ;
  • il faut plus de créativité dans la manière qu'ont les scientifiques d'impliquer le public. Et l'on retombe sur Internet et les blogs…