Enseigner des controverses
1
déc.
2009
J'ai déjà parlé sur ce blog des façons de montrer la "science chaude" en classe et de son intérêt pour l'éducation à la citoyenneté, afin d'apprendre à nos têtes blondes non seulement quelle est l'équation fondamentale de la dynamique mais aussi ce qu'est un expert, comment la science fonctionne (je veux dire réellement), comment confronter les discours pour se faire un avis etc. L'étude des controverses socio-techniques ou questions socialement vives (OGM, virus A/H1N1, réchauffement climatique…) permet d'entrer dans ces questionnements complexes et assez nouveaux pour l'école.
Forcément, c'est un vaste sujet et je n'ai fait que l'effleurer — par curiosité intellectuelle ici, à titre professionnel lors d'un festival de science. J'ai donc été content d'apprendre qu'une chercheuse en didactique de l'ENS Cachan, Virginie Albe, avait publié un livre aux Presses universitaires de Rennes sur cette seule question. J'en ai profité pour le lire et mon compte-rendu détaillé est à voir chez les voisins de Liens socio !
J'en profite également pour signaler que Marine Soichot, doctorante au Muséum national d'histoire naturelle, est passée il y a quelques jours dans l'émission "Recherche en cours" pour parler du blog Pris(m)e de tête et qu'elle a raconté avec talent son travail sur la représentation des controverses (en l'occurrence le réchauffement climatique) au musée. Je vous conseille chaudement de l'écouter !
Commentaires
Merci Antoine pour la promo de REC.
Ce dont du parle constitue par ailleurs une partie de mon sujet de recherche (mais dans les musée et non pas à l'école). j'en profite pour signaler sur le sujet l'ouvrage collectif "l'école à l'épreuve de l'actualité" sur l'enseignement de ce que la communauté française des didacticiens appelle les questions socialement vive. C'est aux éditions EST, coordonné par A/ Legardez et L. Simmoneaux.
Bonjour Enro,
Je viens depuis le blog de Tom Roud (plus précisément, Darwin2009), celui-ci m'ayant recommandé votre site au sujet du commentaire que j'y ai laissé et que je reprends en partie ci-dessous, puisqu'il colle assez précisément avec le sujet de votre billet, me semble t-il :
''"Pour cela, je crois qu’il serait utile que le travail de production du savoir scientifique soit rendu plus visible - et plus lisible - ce qui implique également d’avoir un accès aux controverses qui l’irriguent.
Ceci dit, toute discussion du type de celles que vous évoquez, qui oppose des scientifiques à ces “idéologues du scepticisme” (la formule est un tantinet bizarre, mais je rejoins Luc Allemand pour regretter la distorsion du terme de “sceptique”), ne me semble pas être par nature scientifique.
Il ne peut pas véritablement l’être, puisqu’il s’agira - sur les sujets que vous évoquez, comme sur bien d’autres encore - d’élaborer des politiques communes à partir d’un savoir scientifique lui-même toujours “in progress”, en construction.
Je crois que c’est la synchronisation de ces différentes dynamiques qui est difficile à penser. Mais elle l’est d’autant plus que le “mouvement” scientifique est peu visible, sauf sous la forme apparente d’une volte-face qui semblera toujours soudaine aux yeux d’un public mal informé.
Comment construire un débat qui ne dénature ni les enjeux politiques (au sens large et noble du terme) ni la dimension scientifique d’une problématique me semble être une question d’intérêt public majeure. "''
Sur la question plus précise de la présentation des controverses scientifiques, je dois dire que j'ai été très intéressée par le travail de Bruno Latour sur cette question.
Ci-joint le lien vers une présentation du travail qu'il fait faire à ses étudiants des Mines comme de sciences po (si j'ai bien compris) : http://www.macospol.org/streaming/
Il s'agit, selon la présentation qu'il en fait lui-même, d'apprendre à cartographier des sujets qui sont l'objet d'une expertise technique et qui, en même temps, sont des affaires, souvent embrouillées, mêlant les questions juridiques, morales, économiques et sociales, au point que ces affaires «ces choses publiques» deviennent de plus en plus le cœur de la vie politique. Le cours qu'il propose concerne donc à la fois les méthodes de la sociologie des sciences et des techniques, l'étude de l'argumentation scientifique, l'analyse des médias ainsi que les nouvelles méthodes de «scientométrie» et de «géographie virtuelle» développées sur internet.
Le but est d’explorer, grâce à de nouvelles méthodes pédagogiques et à la fabrication de sites web de controverses, les types d’assemblées qui permettraient de retrouver une forme partagée et légitime d’objectivité.
Il s'agit ensuite, littéralement, de donner à voir la construction d'une controverse (c'est l'objet du powerpoint mis en lien).
Sans doute connaissez-vous déjà, mais au cas où, je me permets de vous en recommander la lecture...
PS : je dois vous préciser que je ne suis pas du tout de formation scientifique - je suis juriste. Mais je m'intéresse à la chose scientifique - suffisamment pour être ravie de découvrir votre blog !
Et bonne année !
@Fantômette : Bonjour et bienvenue sur ce blog. Je suis d'accord avec vos observations et les conclusions que vous en tirez. Cet article récent de Chris Monney dans le Washington Post vous intéressera sans doute, avec cette phrase couperet : .