Correction du bac : une connaissance scientifique du vivant est-elle possible ?
18
juin
2008
C'est un des sujets de philosophie du bac 2008 qui a le plus alimenté la discussion sur les blogs scientifiques : Une connaissance scientifique du vivant est-elle possible ?
S'il a fait couler tant d'encre (virtuelle), c'est surtout parce qu'il ne semble pas problématique à la plupart des personnes à l'esprit scientifique qui nous entourent. Un lecteur de Tom Roud est le premier à s'en étonner. Lequel Tom répond qu'il n'y voit goutte, à moins que la question soit de disserter sur la place de l’homme dans le vivant
. Helran, étudiante en biologie, ne s'en sort pas mieux. Les forums non plus. Et un ami doctorant en neurosciences de donner sa langue au chat dans un courriel légèrement angoissé… ;-)
Avertissement : ce billet n'est pas une correction en bonne et due forme. Simplement, après réflexion, ce sujet ne me semble pas si creux qu'il en a l'air et j'avais envie de partager avec vous quelques pistes de réflexion.
Le bachelier peut partir bille en tête sur les limites de la connaissance et ses présupposés, mais il loupe à mon avis la dimension propre au vivant. Quelle est-elle me demandez-vous, vous qui avez si bien incorporé la génétique, la biochimie et la biologie que le vivant semble un objet physique comme un autre ? J'en vois plusieurs :
- le vivant, ou au moins une partie d'icelui, possède un cerveau qui lui donne un sentiment de libre arbitre : je suis capable de prendre des décisions, de faire des choix, de balancer des arguments opposés, et cela en toute conscience. Pourtant, l'approche scientifique repose sur une hypothèse de déterminisme très forte : l'objet scientifique idéal est celui dont les lois peuvent-être connues et sont invariantes. Difficile d'en dire autant du cerveau, car même si l'on peut étudier le comportement d'un neurone particulier voire d'un réseau de neurones, des propriétés semblent émerger de ce système complexe. Et la question du libre arbitre n'est encore qu'effleurée par les chercheurs, ou en tous cas reste sujette à discussion.
- le terme de "vivant" regroupe une large palette d'organismes et de milieux, de la bactérie qui peuple mon tube digestif aux peuplades étudiées par les ethnologues. Or chacun est étudié par ses spécialistes avec des outils adéquats. Jusque là , rien de très sensationnel : le monde physique vit la même parcellisation, de l'astrophysique à la physique quantique en passant par la physique de la matière molle. Mais le vivant à ceci de particulier qu'il englobe l'être humain et du coup, qu'il fait appel à des sciences humaines et sociales. On peut donc se demander s'il est possible d'obtenir une vision unifiée du vivant, où les apports de la bactériologie épouseraient les apports de la sociologie. Rien n'est moins sûr, mais la question est intéressante et effleure celle du niveau d'étude le plus pertinent pour étudier un système donné.
- le vivant est soumis à l'évolution et rien n'a de sens en biologie si ce n'est à la lumière de l'évolution. D'où cette question : une connaissance scientifique de l'évolution est-elle possible, ou la théorie néo-darwinienne de l'évolution est-elle une théorie scientifique ? Selon votre réponse vous pouvez rentrer directement soit au laboratoire de Guillaume Lecointre au Muséum soit au Discovery Institute américain !
- enfin, si l'on ne considère que le vivant non-humain, alors on peut disserter à loisir sur l'éthologie. Récemment, l'exposition "Bêtes et hommes" à la Grande halle de la Villette montrait combien l'éthologie est une science problématique en raison des présupposés qu'elle a sur ses objets d'étude et de ses difficultés à donner une vision objective du monde animal. Ainsi, Vinciane Despret et d'autres ont étudié par exemple comment le comportement des grands singes n'est pas vu et interprété de la même façon selon que l'observateur est un homme ou une femme…
Bon, cela fait quelques années que j'ai passé mon bac et je ne sais pas si tous ces concepts sont "au programme". Néanmoins, ce sont probablement des pistes qui auraient été appréciées par le jury et avec lesquelles un bachelier peut se familiariser facilement… s'il fréquente assidûment les blogs de science !
Mes remerciements vont à Béné pour m'avoir suggéré quelques pistes pour ce billet !
Commentaires
A la lecture du corrigé, je me suis pris d'une petite nostalgie pour ce bon temps du bac où l'on gamberge, philosophe et cisèle ses phrases à coups de rhétorique aux parfum de langue de bois...
Maintenant, si on me pose la question "une connaissance scientifique du vivant est-elle possible ?", je réponds "oui, absolument."
Vous voulez que je développe ? bon :
quod erat demonstrandum
Ma fille passe son bac cette année, en section littéraire. Elle a choisi l'autre sujet (la perception peut-elle s'éduquer) et comme elle est assez armée pour la philo (c'est une de ses bonnes matières), elle ne s'inquiète pas trop. Tant mieux. Pour ma part j'ai trouvé les deux sujets difficiles à traiter avec cette discipline qu'est la philo. Première approche terre-à -terre : la connaissance du vivant, des centaines de milliers de gens y consacrent leurs journées, voire leurs existences, c'est donc que ça doit être possible de se pencher dessus. En fait je crois que je n'aime pas la philo, je trouve ça souvent un peu oiseux, cette science de salon qui entend juger toutes les autres et qui me semble aussi compétente que des journalistes qui discutent, assis, des performances d'une équipe de foot et de son entraineur (déjà , regarder des sportifs travailler, c'est suspect, se passionner c'est suspect, mais émettre des jugements moraux ou professionnels depuis son fauteuil...). Mais bon je n'ai jamais fait de philo, et au fond je sais bien que les discussions oiseuses peuvent malgré tout produire des idées, et qu'il y a des tas de choses que l'on voit mieux depuis me dehors, assis dans son fauteuil, que depuis l'intérieur. Peut-être qu'on peut aborder le vivant comme un processus, et donc se demander si un processus (par nature instable) peut être connu... Mmmmh... En le disant ça me semble vaseux. La seconde question, sur l'éducation de la perception, me semble encore plus délicate, car elle a été traitée par de nombreuses sciences, de la neurologie à la psychologie sociale, et je ne trouve pas l'angle philosophique très adéquat là encore, il existe des réponses factuelles passionnantes, je ne vois pas l'utilité de blablater là encore. Surtout avec des outils obsolètes mais imposés aux philosophes comme la psychanalyse.
D'accord avec enro : sujet marrant - en fait la philo, j'ai l'impression que ca devient surtout intéressant longtemps apres le bac... Sinon, assez d'accord avec partie des commentaires précédents: - la philiposophie un peu prétentieuse de prétendre "avoir le dernier mot" et juger les autres activités humaines...mais bon ca a toujours été un peu ca. - connaissance scientifique = un peu pléonastique.... en fait dans la question du sujet , ce qui me semble a définir c'est surtout, justement, "une connaissance scientifique". Pourquoi "une" ? il y en a d'autres ? (ou d'autre nature: sprirituelle ? émotionnelle ? religieuse ?) - pour moi si le sujet n'était pas réduit à "vivant", mais à "monde" ca pointerait notamment dans la direction du problème de l'unification de la physique (quantique et relativité générale) dans une seule théorie, par exemple - mais c'est moins de la philo que de la physique, en fait.. Mias bon il faut parler du "vivant", donc en reformulant, qu'y a t-il dans le vivant de particulier qui s'oppose à "une" connaissance scientifique ? En fait, le vivant n'est-il qu'une propriété de la matière ? Si oui, alors pourquoi réduire le sujet au "vivant" ? La complexité ? ca ne me parait pas un obstacle à la science. Mias je pense qu'enro serait ds la bonne direction avec le pb d'unifier les différentes sicences du vivant aux différentes échelles, notamment. "Des" connaissances sont possibles, mais pas "une". Un problème d'"objectivité": nous faisons partie du vivant, donc on ne pas être "juge et partie" ? mouuais.. Faut-il aussi comprendre le sujet dans le sens: doit-il n'y avoir qu'une connaissance uniquement scientifique du vivant ? ( ca ca me fait penser au sujet de ma lointaine année: "la science désenchante-t-elle le réel "?) . Et là je me rappelle la facon d'aborder les sujets de ma prof de philo: penser à qui pose la question... là apparemment c'est qqn qui doute de la science, qui remet un peu en cause le cartésianisme de notre civilisation occidentale, on dirait... Et là on sent bien qu'on va vers les clichés "sicence snas conscience", etc...: meme si une connaissance scientifique du vivant est possible, c'est potentiellement dangereux et la science ne suffit pas (partie III, quoi :-)..) D'ailleurs c'est un peu énervant, cette propension de la philo à toujours vouloir remettre la science à sa place :-)...
Je rajoute que Flammarion vient de rééditer en poche le livre capital de Claire Salomon-Bayet, L'institution de la science et l'expérience du vivant qui, nous dit-on, apporte des éléments de réponse à la question de savoir comment se constitue (historiquement et épistémologiquement) une méthodologie propre aux sciences de la vie...
j'aime bien la philo, celle qui vous rend le cerveau sens dessus-dessous. Non la philo du salon, celle qui vous fait vraiment réfléchir et prendre du recul devant une notion si usitée qu'elle en devient transparente.
Je n'ai pas vraiment réfléchi mais il me semble qu'un mot clé doit retenir toute notre attention: le vivant. Qu'est ce que la vie ? La réponse n'est pas si simple que ça... Comment définir le vivant ? Selon quelles disciplines, quel point de vue ?
De là , nous pourrons passer à l'étape suivante: "une" ou "la" connaissance sans oublier de bien déterminer ce que veut réellement signifier "connaissance" ? Juste une accumulation de savoirs ou un échange permanent ? Autre chose ?
J'en profite pour vous faire part d'un article que j'avais fait sur la notion de la vie: Es tu vivant ?
Et la bonne nuitée je vous souhaite !
"le vivant est soumis à l'évolution et rien n'a de sens en biologie si ce n'est à la lumière de l'évolution" > en soit c'est déjà une connaissance scientifique du vivant ! Pas besoin d'aller plus loin...
# 6 - C'est vrai.. - la question est-donc bien de savoir ce qu'est ce qui est vraiment entendu par "une connaissance scientifique"...
Mais au fait, expliquer au correcteur philosophe qu'il n'est, par exmeple, qu'un artifice inventé par ses gènes pour se reproduire, risque peut-être de ne pas bien passer: d'une facon générale, je me demande un peu ds quelle mesure un tel sujet peut-être traité, et corrigé, sans un assez bon (voir un tres bon) fonds scientifique.
"je me demande un peu ds quelle mesure un tel sujet peut-être traité, et corrigé, sans un assez bon (voir un tres bon) fonds scientifique. "
Entièrement d'accord ... C'est un peu fumeux ce sujet. Sans compter : - qu'au final, je ne suis pas sûr que les définitions classiques d'êtres vivants soient valables (en gros, un virus n'est pas vivant car il n'est pas possible pour lui de se reproduire par lui-même, mais ça me paraît très contestable; moi non plus je ne suis pas capable de me reproduire par moi-même) - toujours sur le vivant, j'aime bien parler des embryons. Un zygote qu'on coupe en deux et produit deux êtres différenrs est-il vivant ? Une cellule de notre corps, qu'on peut cultiver en labos, est elle vivante ? Quelle est la différence entre une cellule de notre corps (la partie) et nous mêmes (le tout) en terme de "vivant" ?
En fait, je ne suis même pas sûr que le "vivant" soit une notion scientifique (un peu comme la polémique sur la notion d'espèces en biologie); donc de là à en avoir une connaissance scientifique ...
Mais bon, comme c'est de la philo, je suis sûr qu'il fallait surtout réfléchir à l'homme, ce roseau pensant, et lire "est-il possible d'avoir une connaissance scientifique de l'homme ?". Sous-entendu : les bactéries et les bêtes, sûrement, mais nous autres les êtres évolués, non...
Tom Roud : Non, pas nécessairement. Je pense que vous sous-estimez le niveau des terminales en philo, et que vous avez une vision un peu caricaturale de la philo (un peu du genre : "une matière où à la fin il faut se demander qu'est-ce que l'homme?"). Un bon cours d'épistémo (que j'ai moi-même oublié) permet de se poser quelques questions de base. La place du hasard dans l'évolution peut être un point de départ, la question du réductionnisme aussi (si une partie de la biologie se réduit à de la chimie, alors qu'est-ce que le vivant là dedans ?). Quelles sont les limites de la connaissance d'une bactérie? (parce qu'elle mute, parce qu'elle intéragit avec un milieu qu'il est difficile d'isoler). Bon, j'aurais peur d'aligner les inepties scientifiques, mais si ce n'est pas trop le cas, ces questions me semblent intéressantes (et puis si je passais maintenant, j'aurais trouvé un moyen de parler de la vie de laboratoire de Latour, et puis de son Pasteur, mais bon, ça ne doit pas être encore au programme).
"Bon, j'aurais peur d'aligner les inepties scientifiques"
Oui, c'est un peu le problème qui fait que ce sujet est théoriquement inabordable pour des étudiants en terminale. Peut-être l'idée est qu'ils se débrouillent avec ce qu'ils ont; mais c'est pour cela que la tendance naturelle me semble de repartir sur des questions plus "culture classique".
Mon premier réflexe a été de répondre exactement comme Dr. Goulu. Mais, à la réflexion, si la réponse est bonne, alors il n'y a pas de dissertation de philo, et donc, c'est que la question est mauvaise. Et l'horrible solution est la suivante: par "connaissance scientifique", l'examinateur entend "certitude", ce qui signifie qu'il ne sait pas ce qu'est la science, et qu'il n'a pas lu Popper. Il croit à l'"autorité" scientifique. On se demande dans quel monde vivent nos enseignants, en tout cas, très loin de la philosophie vivante.
woody > Marrant de faire le procès des enseignants de philosophie... alors même, peut-être, que ce dont tu les accuses est exactement ce dont ils accusent les étudiants et qu'ils veulent mettre à l'épreuve avec un tel sujet. En tous cas, je te l'accorde, la philosophie traditionnelle (donc celle enseignée à l'école je présume) est totalement déconnectée de la réalité de la science. Heureusement que depuis Kuhn, on a eu des sociologues et des historiens pour nous faire avancer ;-) C'est bien ce qu'écrit Markss, une telle dissertation est beaucoup plus intéressante avec un soupçon de Latour !
Ce que j'ose prétendre, c'est que la philosophie universitaire française me semble passablement déconnectée de la philosophie contemporaine (indiquée par le lien http://plato.stanford.edu/contents.html ). Sinon comment expliquer la question du bac? Et que signifie une philosophie déconnectée de la réalité, fut-elle de la science ou d'autre chose?.
Bonjour à tous,
J'ai passé mon bac de philo lundi et j'ai choisi le sujet sur la connaissance scientifique du vivant et...je me sens pas très rassurée si quelqu'un peut éclairer mes lanternes ! voilà j'ai donc répondu "oui" au fait que l'on pouvait connaitre le vivant grace à la science et surtout à la théorie, l'expérimentation...comme l'a suggéré DR Goulu (en haut de la page) et j'ai bâti mon devoir sur ça. J'ai bien peur du hors sujet car je n'ai pas vraiment pris le temps de reflechir à d'autres pistes car j'avais tellement peur de ne pas pouvoir finir le devoir ! tout d'abord j'ai évoqué le fait que le vivant fasse partie de notre "sphère", de notre réel aidait d'autant plus le scientifiques à elaborer des experimentations, puis que l'on arrivait à connaitre le réel en comprenant le "langage" de celui-ci (référence à Galilée) avec l'exemple des variétés plantes se développant dans des lieux permettant de connaitre leur besoin en eau, soleil. Et là c'est le drame...j'ai parlé ensuite du fait que l'on n'avait tout de même pas une connaissance absolue du vivant car on arrivait pas à comprendre les facteurs de certaines maladies...et j'ai fais une partie sur le doute "absolue" du Descartes, que l'on doit douter du réel...mais si on ne peut pas connaitre le vivant au moyen de la science rigoureuse, comment peut on avancer dans nos recherches scientifiques ? aie aie je le sens mal... surtout que j'ai fait un élargissement sur la religion et la "naissance" du monde, que la question du dieu transcendant était une question beaucoup trop ambitieuse et une affaire de croyance donc la science ne pouvait pas s'mposer dans ce cas là ...qu'en pensez vous ? :s
excusez moi pour les fautes je ne me suis pas relue !
"je me demande un peu ds quelle mesure un tel sujet peut-être traité, et corrigé, sans un assez bon (voir un tres bon) fonds scientifique. "
Je ne pense pas que les correcteurs analysent vraiment le fond de la réponse du candidat lors des épreuves du bac (en philo). Même si la question peut être intéressante et que chacun des commentaires plus haut apportent des réponses pertinentes. Il faut voir que les bacheliers, n'ont pas de cour de philo. Mais plutôt une longue introduction d'un an, plus ou moins réussite selon les profs, aux thèmes que peut aborder la matière. Ce qui sera jugé lors de cette épreuve sera la cohérence de l'argumentation et la pertinence du questionnement.
Sur la question elle même, ce n'est qu'un point de vue, mais personnellement:
1°j'aurais défini ce qu'est la connaissance scientifique: qu'est ce qui donne à la connaissance sa qualité scientifique (postulat, démarche, résultat...) réponse: le protocole expérimental.
2° j'aurais essayé de savoir ce qui faisait problème dans la phrase. Qu'est ce qui dans la notion de "vivant" s'oppose à la science ou à la connaissance. Je crois que derrière cette question il a l'ombre de "Intelligent Design". Raisons par l'absurde: Si la connaissance du vivant n'est pas scientifique alors qu'est elle? spirituelle? mais ce n'est plus une connaissance c'est une croyance.
La conclusion est simple la connaissance du vivant ne peut être que scientifique, si l'on définit la connaissance comme la vérification des faits par l'expérience.
Ce dont il s’agit, en dissertation de philosophie, c’est de faire travailler les concepts en jeu dans l’énoncé du sujet au moyen de quelques séquences de pensée remarquables dans le champ philosophique.
Il n’est donc pas demandé à l’élève de livrer coûte que coûte sa réponse à la question posée - bien que cela ne lui soit pas non plus refusé par principe -, mais d’effectuer un cheminement à partir d’elle et par le truchement au moins de ce qui, en classe, aura été étudié à propos du thème concernant le sujet.
Ce qui importe, en d’autres termes, c’est de mobiliser tel philosophème à bon escient, de le restituer en se tenant sur le sol de la philosophie particulière dont il n’est qu’une séquence, de l’expliquer dans le but de l’argumenter voire de le réfuter, par exemple à l’aide d’un autre philosophème, et de ne répondre que par la dialectique argumentée des philosophies qu’on est capable de produire.
Que ce sujet porte sur le vivant n’est donc pas plus problématique que ce que d’autres portent sur la perception ou sur l’art ; non pas qu’on se satisfasse, en philosophie, de se rapporter de loin à ces domaines, mais simplement que pour être introduit véritablement à celle-ci, il faut connaître ce que quelques philosophes majeurs en disent, ce qui est déjà bien assez difficile - et il suffit de cela, car ce qui compte pour commencer, c’est l’érosion de sa naïveté à même l’étude des grands textes -, chacun pourra en attester en sacrifiant à cet exercice de patience qu’est la dissertation qui, contre tout empressement à livrer sa propre réponse, impose de ne ce faire que par l’emprunt des chemins déjà tracés par les philosophes. C’est dans ce travail que peut se constituer, si nécessaire, sa propre contribution à la philosophie de l’art, des sciences, de la politique et de la morale, par exemple.
@Discom
"impose de ne ce faire que par l’emprunt des chemins déjà tracés par les philosophes". C'est en cela que la philosophie en France est une science morte, réduite à l'état d'"Histoire de la Philosophie".
@Woody : Vous généralisez un peu vite, il y a beaucoup de (fac de) philosophes en France, et beaucoup font des choses différentes! Ce qui est en cause est davantage le fait de ne faire qu'un an de philo.
Sinon je suis assez d'accord avec Discom, nous sommes sur un blog scientifique, donc on s'inquiète qu'un élève de terminale ne saurait pas assez de chose sur la biologie, pour sortir autre chose que des généralités, au mieux hors sujet, au pire inexactes. Mais je suis certain que des historiens de l'art pourraient avoir la même inquiétude sur un sujet d'esthétique : le Terminale moyen sortira des souvenirs flous et erronés de ce qu'il a appris en Arts plastiques au collège, et s'en sortira par des généralités sur le Beau, ou je ne sais quoi. S'il n'y a pas d'énormités, la cohérence générale de l'argument est plus importante que l'exactitude du contenu.
"impose de ne ce faire que par l’emprunt des chemins déjà tracés par les philosophes". C'est en cela que la philosophie en France est une science morte, réduite à l'état d'"Histoire de la Philosophie".
C’est justement le contraire qui est dit. Et il n’est pas non plus question d’inexactitudes vaguement cohérentes, même en classe terminale, et même si la pratique philosophique qui y est exigée n’a qu’une valeur propédeutique.
Merci pour le liens. Sur mon blog j'ai lancé quelques idées après 5 minutes de réflexions sur la question. Et si j'avais été à leur place, j'aurais parlé d'une part sur comment est validé une connaissance scientifique (constat, hypothèse, expérience...) contrairement aux faits et dires religieux. Ensuite, j'aurais parlé des moyens techniques qui fait que pour le moment on ne connais pas tout du vivant, avec par exemple la découverte du microscope qui à permis de découvrir le monde microscopique... et qu'à l'heure actuelle, on a pas tout découvert pour des raisons techniques, financière (si on donne pas d'argent à la recherche fondamental comment découvrir des choses, mais la c'est un autre débat), humain...
Voila, enfin la philo ca remonte à loin.
@Markss : l'expérience du beau est distincte de l'histoire de l'art et des arts plastiques (heureusement). Est-ce qu'une "connaissance scientifique du vivant" peut se concevoir en dehors de l'histoire des sciences ? Pourquoi pas. Ce qui nous ramène au sujet sur la vulgarisation scientifique. La science, est-ce d'avoir lu Darwin et ses suiveurs, de connaître la méthodologie statistique à suivre pour analyser je ne sais quel organisme, ou est-ce que c'est d'ouvrir les yeux sur la nature et de rééditer des expérimentations faites mille fois par d'autres ? Quand un scientifique connaît le résultat d'une expérience qu'il n'a jamais fait lui-même et ne refera pas non plus (parce qu'un grec l'a faite il y a 2500 ans, et que d'autres l'ont vérifié dans tous les sens, détaillé, théorisé, rethéorisé, etc.), est-ce qu'il est "savant" (qui sait) ou est-ce qu'il commet une faute professionnelle ?
le sujet à traiter, c'est la notion de loi générale (citer Jean Perrin, Einstein,Poincaré). la science, par définition, est la connaissance des lois générales, accessibles par la méthode scientifique (citer Galillée), qui consiste à étudier des expériences reproductibles. Pour qu'une connaissance scientifique du vivant soit possible, il faut que le vivant obéisse à des lois générales. D'où le plan en trois parties :
1- le vivant n'obéit pas à des lois générales :
2- le vivant obéit à des lois générales
3- Synthèse
Conclusion
Excellent sujet
@vf Je ne suis pas d'accord du tout pour assimiler la connaissance scientifique à la détermination de lois générales. Et même dans ce cas, je ne suis pas d'accord avec ce que vous considérez comme spécifique du vivant. L'unicité de l'évolution a son correspondant dans l'origine de l'univers, et le "libre arbitre" n'est une question qui n'intéresse qu'une infime partie des êtres vivants. Avec Popper, je pense que ce qui définit la science n'est pas son objet, mais sa méthode.
il me semble que ce que vous dites est contenu dans la phrase
"par définition, est la connaissance des lois générales, accessibles par la méthode scientifique (citer Galillée), qui consiste à étudier des expériences reproductibles."
Popper, c'est la "réfutabilité", donc faut bien faire les expériences reproductibles, donc cette méthode concerne des phénomènes généraux, au moins dans ce sens là . Mais je n'ai peut-être pas compris ce que vous voulez dire.
"L'origine de l'univers" n'est pas une science, me semble-t-il, ce qui est une science, c'est l'étude de l'univers depuis. L'origine de la vie devient peu à peu une science.
"libre arbitre" n'est une question qui n'intéresse qu'une infime partie des êtres vivants,
absolument d'accord. Mais, c'est pas facile de trouver dans le vivant, des choses qui échappent à la science. Le libre arbitre, c'est pas mal sur ce plan là . Pour l'instant, le libre arbitre échappe à la science (d'où ma citation de Racine, et plus généralement de la tragédie, qui illustre mieux l'idée, que de citer par exemple Turing, l'intelligence artificielle n'ayant pas dépassé le stade de la foutaise, il me semble).
A propos de la philosophie :
http://www.liberation.fr/rebonds/338126.FR.php