La science, la cité

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Mot-clé : éthique

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Le "publish or perish", coupable idéal de la fraude scientifique

Toujours à propos de la fraude scientifique, un discours omniprésent ces derniers mois n’a de cesse de m’agacer : le fait de mettre la hausse des cas de fraude sur le dos de la pression à la publication, le fameux “publish or perish”.

La pression à la publication est un coupable idéal mais je tiens à rétablir son innocence ! Le raisonnement semble logique : à trop demander des résultats aux chercheurs, on les pousse à s’affranchir des règles de bonne conduite et à plagier, à fabriquer ou falsifier des résultats… Et pourtant, c’est démenti par une étude intitulée on ne peut plus explicitement “Misconduct Policies, Academic Culture and Career Stage, Not Gender or Pressures to Publish, Affect Scientific Integrity”. Ses auteurs ne sont pas des inconnus : l’un, Vincent Larivière, est spécialiste de scientométrie (l’étude de la dynamique scientifique à partir des publications) ; l’autre, Daniele Fanelli, de méta-revues et d’éthique de la recherche.

Qu’ont-ils montré exactement ? Par une étude multifactorielle de 611 articles rétractés (suite à une fraude) et 2226 articles ayant fait l’objet d’un erratum (suite à une erreur honnête) en 2010-2011, ils ont corrélé la probabilité des premiers et derniers auteurs de frauder ou d’être intègre respectivement, avec des facteurs de risque psychologiques, sociologiques et structurels :

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Ils concluent que le sexe des auteurs n’est pas statistiquement significatif, que la fraude a plus de risque de se produire dans les pays qui n’ont pas de code de conduite, où la critique des pairs l’emporte sur le respect de l’autorité, où la performance est rétribuée financièrement, et au début de la carrière des chercheurs. La probabilité de frauder étant plus faible dans les pays où la performance de publication détermine l’évolution de carrière et le financement de la recherche, ils concluent que the widespread belief that pressures to publish are a major driver of misconduct was largely contradicted: high-impact and productive researchers, and those working in countries in which pressures to publish are believed to be higher, are less-likely to produce retracted papers, and more likely to correct them.

Les mêmes auteurs ont remis le couvert il y a quelques mois en montrant que le taux de publication individuel des chercheurs n’avait pas augmenté depuis un siècle. Ce qui a augmenté c’est le nombre d’article en collaboration, mais quand on compte chaque article comme une fraction du nombre d’auteurs de l’article alors l’effet disparaît. Par conséquent : the widespread belief that pressures to publish are causing the scientific literature to be flooded with salami-sliced, trivial, incomplete, duplicated, plagiarized and false results is likely to be incorrect or at least exaggerated.

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Je n’ai pas encore trouvé d’explication à la propagation de ce mythe, à part qu’il permet de blâmer les agences de financement et la culture de l’évaluation à tout va, dont beaucoup de chercheurs se passeraient bien volontiers…

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Fraude et intégrité scientifique : lettre ouverte à l'Académie des sciences

Monsieur le Président Bernard Meunier,
Madame la Secrétaire perpétuelle Catherine Bréchignac,
Monsieur le Secrétaire perpétuel Jean-François Bach,

en tant que citoyen, je m’honore de contribuer à la culture scientifique de ce pays et de ses habitants. Depuis 10 ans, je tiens sur mon blog « La science, la cité » la chronique des bonnes et mauvaises relations entre science et société. Ce rôle de vigie, j’aimerais le partager avec notre assemblée la plus auguste, siégeant quai Conti.

Statutairement, l’Académie exerce cinq missions fondamentales : encourager la vie scientifique, promouvoir l’enseignement des sciences, transmettre les connaissances, favoriser les collaborations internationales et assurer un rôle d’expertise et de conseil. L’exemplarité éthique n’en fait pas partie mais c’est une responsabilité qui lui est reconnue de fait :

  • le rapport de Pierre Corvol propose de « mieux impliquer les Académies en matière d’intégrité dans les sciences et faire la promotion de leurs travaux dans la matière » (Proposition n° 13)
  • le Président Hollande, dans son discours de ce jour, désigne les scientifiques de l’Académie comme un rempart contre les « égarements » des « charlatans ».

Vous comprendrez ma colère et mon incompréhension du fait que l’Académie des sciences accueille en son sein un fraudeur notoire, à l’origine du plus grand scandale de fraude scientifique en France depuis l’affaire Bihain dans les années 1990. Olivier Voinnet, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a été suspendu par [MàJ 16/10] ses employeurs, l’ETH Zürich et son employeur le CNRS. Mme la Secrétaire perpétuelle Catherine Bréchignac peut mesurer la gravité de cette décision puisqu’elle a dirigé pendant cinq ans le CNRS, et qu’elle n’a jamais eu à prononcer une telle sanction.

Par conséquent, je tenais à vous exprimer ma révolte et à lire la défense que vous voudrez bien m’opposer. Dans cette attente, je vous prie de croire, chers membres du Bureau de l’Académie des sciences, ma considération la plus distinguée.

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[MàJ 28/09] Ceux qui ont suivi l’affaire Voinnet et savent déjà qu’il est membre de l’Académie des sciences me demandent s’il y a du nouveau le concernant. La réponse est non. Ce qui a motivé mon courrier c’est que l’Académie, très exposée en cette année de son 350e anniversaire, se pare de plus en plus d’une probité qu’elle ne me paraît pas mériter. On me demande également s’il est possible d’exclure un membre de l’Académie. Ses statuts prévoient que tout Membre, à compter du jour où son élection a été approuvée par le Président de la République, jouit durant sa vie entière de la totalité des droits que lui confère son élection, sans limitation aucune sauf celle prévue à l’article 25 des présents Statuts.. Rien n’est donc prévu pour exclure les brebis galeuses ; et on ose nous parler d’exemplarité…

[MàJ 14/10] En toute discrétion (je le dois à FX Coudert qui l'a repéré et tweeté), l'Académie des sciences a publié un communiqué de presse où elle annonce qu'Olivier Voinnet a été élu à l’Académie des sciences en novembre 2014 avant la mise en cause de plusieurs de ses publications. À ce jour, il n’a pas été reçu sous la Coupole, acte solennel d’intronisation de tous les membres de l’Académie des sciences. Dès que les conclusions de la commission mixte CNRS-ETH seront connues, notre Académie prendra alors les décisions nécessaires. Pendant cette période d’attente, notre Compagnie s’abstiendra de tout commentaire. Ce que je ne comprends pas c'est que le chercheur sur lequel porte l'investigation CNRS-ETH en cours n'est probablement pas O. Voinnet (mais l'un de ses co-auteurs). Pourquoi donc attendre le résultat de cette enquête dont les détails ne sont pas connus alors que celle qui portait sur O. Voinnet est terminée et a conduit à sa suspension ?!

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L'éthique, affaire de tous les chercheurs

À l'aimable invitation de Thomas alias @valerossi, je devais intervenir hier avec Mélodie à la journée des doctorants en informatique du Labri pour une table-ronde consacrée à l'éthique, la déontologie et la morale dans la recherche. Une laryngite et une nuit blanche m'ayant joué un sale tour, j'ai malheureusement dû déclarer forfait. Voici la substance de mon intervention, avec quelques tuyaux fournis par les informaticiens David Monniaux et Nicolas Holzschuch que je remercie. Je vous invite également à lire l'autre intervention de Mélodie.

Une mauvaise habitude : créer des comités d'éthique

En général quand on parle d'éthique, c'est en l'accolant au terme "comité" : l'éthique, c'est ce dont s'occupe un comité d'éthique. Et comme il fait ça très bien, on est bien content de pouvoir se reposer sur lui. C'est une tradition américaine, qui fait florès à Bruxelles (Commission européenne) et en France.

Dernier avatar de cette manie : fin 2009, deux rapports du comité d'éthique du CNRS et d'une commission de l'Inria recommandaient la création d'un comité d'éthique sur la recherche dans les sciences et technologies du numérique, de composition pluridisciplinaire.

Dans le même ordre d'idée, le Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche en 2008 a confié au "chargé des relations science-société" du CNRS une mission sur l'intégrité scientifique. Pourquoi est-ce choquant ? Parce qu'associer l'intégrité scientifique, qui concerne chaque chercheur dans son travail le plus fondamental, à l'interface science-société conduit à penser que c'est la société "impure" qui salit les pratiques sinon irréprochables des chercheurs.

Pourquoi c'est dangereux ?

Revenons quelques instants sur le plus connu des comités d'éthique, le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), est aussi l'un des tout premiers et date de février 1983. Il s'est imposé comme lieu de la réflexion nécessaire sur les progrès scientifiques en biologie. Cette réflexion se traduisait d'abord par des avis ("voici ce que nous pensons"), puis après 1994 par des recommandations ("voici ce qu'il conviendrait de faire"), conduisant tout droit à des décisions du parlement. Dépourvus de toute légitimité démocratique, les comités d'éthique ont ainsi tendance à supplanter le législateur.

Au niveau communautaire, la Commission a mis en place son premier organe consultatif d'éthique en 1991, pour rassurer les investisseurs en biotech et garder le contrôle du débat.

Pour ces raisons et d'autres, l'éthique ne doit pas être confisquée par quelques "sages" situés au-dessus de la mêlée.

L'éthique, affaire de tous

Pour reprendre ce que disait Lucas Bento [doctorant en droit et intervenant à la table-ronde], la liberté et à l’indépendance du chercheur qui sont autant mis en avant doivent avoir quelques contreparties. Il me semble que le sens de responsabilité en fait partie. Non pas pour "arrêter tout" (quoique…) mais pour prendre de la distance, recentrer les questions ou corriger les réponses.

L'histoire des sciences nous offre quelques exemples parlants :

  • dans les années 1950, les biologistes William Russell et Rex Burch formulent la règle des "3R" pour humaniser l'expérimentation animale : replace - reduce - refine
  • dans les années 1950, Norbert Wiener pressent l’importance des bouleversements sociaux induits par les développements de l’automatique théorique et de ses applications. Il pose alors les fondements de ce qu’il appelle la cybernétique du second ordre, qui étudie la dynamique de systèmes constitués eux-mêmes de systèmes cybernétiques, comme l’est la société.
  • en 1975, Paul Berg (futur prix Nobel) prend soudain conscience des risques du génie génétique et propose par une lettre à ses collègues biologistes de stopper les recherches. Quelques mois plus tard, il organise la conférence d'Asilomar pour réfléchir collectivement à une mitigation des risques, ce qui permit de lever le moratoire. (Au passage, le fait que de nombreux pionniers de la biologie moléculaire étaient d'anciens physiciens ayant participé au projet Manhattan, n'a pas été étranger à cette décision)

Dans son plan stratégique 2008-2012, l'Inria s'était donné pour objectif d'analyser le besoin et de trouver des solutions pour accompagner ses chercheurs confrontés à des questions éthiques. Puis en 2010, il a reconnu que toutes ses équipes de recherche peuvent "être confrontées à des questions éthiques" (source).

L'éthique en pratique dans les sciences et technologies du numérique

Voici les enjeux les plus sensibles en termes d'éthique selon le rapport du Comité d'éthique du CNRS :

  • protection de la vie privée (intrusion, traçabilité, cryptage et confidentialité, conservation des données, gestion des informations personnelles)
  • impact sur l'homme (nouvelles médecines, homme augmenté, manipulations mentales, addictions, saturation cognitive et nouveaux modes de pensée, informatique émotionnelle)
  • droits des robots (le robot comme une personne)
  • risques sanitaires (antennes relais), technologiques (défaillance des appareils) ou environnementaux (déchets électroniques)
  • formation et travail (accès au savoir, télétravail, harcèlement numérique…)
  • échanges économiques (droits de propriété, monnaies et modèles économiques, pratiques commerciales)
  • vie collective (fonctionnement démocratique et e-gouvernement, souveraineté et cyberterrorisme, communautés, gouvernance des réseaux, confiance et défiance)
  • information et connaissances (qualité des informations, mise à disposition d'informations, gestion de la connaissance)

Un comité d'éthique 2.0

Le comité d'éthique que j'appelle de mes vœux c'est celui qui ne se substitue pas à la parole des chercheurs mais qui les sensibilise et forme les chercheurs aux enjeux éthiques, qui soutien des projets de recherche ELSA ("Ethical, legal and social aspects")…

Pour conclure, j'aimerais vous lire un extrait de l'ouvrage collectif Les scientifiques jouent-ils aux dés ?, auquel j'ai participé : "la conscience éthique, tout comme la prise en compte des contraintes externes dans la détermination des champs de recherche, montre simplement que la science ne constitue pas une activité déconnectée du tissu économique et social de son époque. Le mythe du savant enfermé dans sa tour d'ivoire est définitivement révolu".

Je compte sur vous pour le démontrer au quotidien !

Ressources pour exercer sa vigilance

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Histoire de blogs : les débats bioéthiques

Ce mois-ci dans ma chronique blogs sur la Radio suisse romande, les questions de bioéthique.

La bioéthique fait l'objet de débats car elle ne s'arrête pas à  ce que dit ou fait la science mais l'interroge. Elle confronte les points de vue, chacun pouvant apporter sa pierre à  l'édifice en fonction de son vécu, ses convictions ou sa religion, et fournit un échange permettant d'aller au fond des choses et au-delà  des apparences. Le but final ? Construire un monde dans lequel nous pouvons tous vivre ! C'est notamment pour toutes ces raisons que la France a lancé récemment les états généraux de la bioéthique, prélude à  la révision d'ici 2011 de sa loi de bioéthique datant de 2004 et déjà  dépassée.

Cette réflexion sur la bioéthique est vaste est vaste mais on en trouve quelques éléments sur les blogs. Regardons d'abord du côté du blog créé par la Conférence des évêques de France (une grande première !), qui devrait couvrir à  terme tous les thèmes des états généraux, des recherches sur l'embryon à  la maternité pour autrui en passant par le diagnostic prénatal et l'assistance médicale à  la procréation. C'est un blog très vivant, avec de longs commentaires auxquel les auteurs du blog prennent la peine de répondre. Exemple, ce billet sur la maternité pour autrui écrit par le doyen de la faculté de théologie de Lyon, également membre du Comité consultatif national d'éthique. Xavier Lacroix s'y oppose à  l'assistance médicale à  la procréation pour les personnes célibataires et les couples homosexuels, ainsi qu'aux mères porteuses, soit une opinion très tranchée et nettement argumentée. Mais les commentaires n'offrent pas moins une belle palette d'opinions variées et de témoignages, entre le chercheur qui raconte les premiers stades du zygote mû par un "souffle de vie", le citoyen qui se penche sur la notion de "famille" ou deux jeunes femmes qui racontent leur impossibilité physique de porter un enfant à  terme mais se divisent sur le recours à  la gestation pour autrui ou non.

La réflexion bioéthique ne connaît pas de frontières et les blogueurs expatriés, comme Tom Roud qui est aux Etats-Unis, peuvent nous éclairer sur nos débats nationaux. Ce mois-ci, il commentait la décision de Barack Obama d'autoriser à  nouveau la recherche sur les cellules souches en ressortant le discours de Bush de 2001 qui avait mis ces recherches entre parenthèses ! Sa conclusion, c'est que la conclusion que la doctrine Bush s'appuyait à  la fois sur une argumentation politicienne habile et sur une foi religieuse assumée et revendiquée. Dans les commentaires, la discussion tourne essentiellement autour du statut de l'embryon : être humain, être en puissance ou simple forme biologique vivante. Nuances absentes du discours de Bush, qui profite de certaines approximations pour construire son argumentation.

Et puis je voudrais mentionner pour finir le blog de Samia Hurst, médecin et bioéthicienne, qui travaille à  l'Institut d'éthique biomédicale de Genève. Elle y publie abondamment sur de nombreux sujets, depuis les récentes déclarations du pape sur le préservatif en Afrique jusqu'à  la situation du don d'organe en Suisse. Par rapport à  ses voisins, celle-ci connaît une pénurie d'organes nettement plus importante. Dans le détail, elle s'en sort mieux pour les dons de son vivant (par exemple un rein à  un proche) que pour les dons posthumes, la faute à  une campagne d'information du public peut-être un peu trop molle et à  l'organisation de la profession insuffisamment volontariste

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Nouvelles du front (12)

Le 7 juin, au Salon européen de la recherche et de l'innovation, le freezing est devenue une arme politique du mouvement Sauvons la recherche. Sauf qu'ils ont encore du progrès à  faire, on voit un gars bouger à  la 37e seconde et une nana à  la 54e et à  mon avis, la vidéo serait bien plus percutante si elle s'ouvrait sur la mise en place du freezing

Le 3 juin, un candidat américain promettait vaguement de renewing our commitment to science and innovation. Mais ces quelques mots prononcés par Obama ne sont pas passés inaperçus tant les américains en veulent aux républicains d'avoir fait du mal à  leur science.

En juin, le magazine ''research*eu'' de la Commission européen (DG Recherche) nous gratifait d'un beau lieu commun : dans une époque surchargée de communiqués de presse, blogs et autres wikis, personne n'est à  l'abri de l'inexactitude, encore moins lorsqu'il s'agit de science (p. 14).

Le 19 juin, la revue Nature frôlait le numéro spécial sur la fraude scientifique avec un éditorial, l'annonce de la suspension d'un chercheur mal intentionné à  l'Université de Pennsylvanie et une enquête montrant que seulement 58 % des 201 comportements frauduleux observés par les 2,212 chercheurs interrogés ont été signalés à  la hiérarchie ces trois dernières années. Et les 24 cas soumis chaque année en moyenne par les institutions de recherche à  l'Office of Research Integrity américain ne sont que le sommet de l'iceberg... Ce qu'il manque, affirment les auteurs de l'étude ? Une culture de l'intégrité dans les labos.

Le 23 juin, un article du rédacteur en chef de Wired, le père de la "longue traîne" Chris Anderson, annonçait la fin de la théorie et le début de la science empirique basée sur les quantités colossales de données dont on dispose désormais. Un peu comme Google qui ne fait aucune hypothèse et modèle mais rend compte de nos habitudes et notre langage en moulinant des pétaoctets de données dans des serveurs équipés d'algorithmes surpuissants. Mais à  la question qu'est-ce que la science peut apprendre de Google ?, Alexandre Delaigue apporte une réponse très réservée tandis que Gloria Origgi de l'Institut Nicod s'enthousiasme beaucoup plus.

Les deux élèves-ingénieurs français tués à  Londres le 29 juin étaient des… spécialistes de l'ADN selon l'article du Monde. Or une enquête rapide montre que Laurent Bonomo étudiait un parasite qui se transmet des chats aux foetus c'est-à -dire Toxoplasma gondii, probablement dans ce labo. Gabriel Ferrez, lui, étudiait des bactéries capables de créer de l'éthanol utilisable comme biocarburant, probablement dans cet autre labo. On est loin de simples spécialistes de l'ADN, une dénomination qui équivaut sans doute pour Le Monde à  un synonyme de "biologiste"...

En juillet, nous apprenions l'étonnant destin de l'article en français le plus cité de la base bibliographique Scopus (plus de 500 citations), lequel posait les bases de la vertebroplastie en 1987.

Le 11 juillet paraissait dans Science un article (en accès libre ici) de sociologues des médias étudiant l'attitude des chercheurs face aux journalistes scientifiques. Le résultat selon lequel 46 % des chercheurs interrogés ont une expérience plutôt positive d'un tel contact, venant à  l'encontre d'autres études, a été longuement commenté.

Dans son numéro suivant, Science frappait à  nouveau un grand coup avec un article de James Evans montrant que la mise en ligne des publications scientifiques entraîne un appauvrissement des citations bibliographiques (les articles cités sont de plus en plus jeunes et de moins en moins variés). Selon l'auteur, ce serait parce qu'en naviguant en ligne on a plus tendance à  être guidé vers les articles clés d'un domaine (en mode suivi des liens hypertextes "Voir aussi...") et à  faire un choix plus strict des références à  citer (puisqu'elles sont accessibles et vérifiables en ligne). Fini notamment l'heureux hasard ("sérendipité") qui permettait, en potassant les sommaires d'une revue, de faire des rapprochements inattendus et d'explorer des voies de traverse. Le consensus se construit désormais à  vitesse grand V. Le magazine The Economist y voit la fin de la longue traîne dans les citations (via l'Agence Science-Presse). Stevan Harnad, en tous cas, fait le tri entre les diverses explications de ce phénomène, tout comme un commentaire de la revue Science...

Le 20 juillet à  l'Euroscience Open Forum de Barcelone, des experts ont appelé à  la prise en compte des risques toxicologiques des nanotechnologies. Il semble en effet que des résultats scientifiques récents mettent en évidence l'existence de risques brandits depuis longtemps...

Le 29 juillet, un éditorial de la revue Genome Biology se moquait gentiment du facteur d'impact en imaginant que le même système est appliqué pour décider si l'on est envoyé au paradis ou en enfer (via Pawel). Extrait :

Genome Biology : Ecoutez, une fois que le facteur d'impact a dominé l'évaluation de la science, les chercheurs créatifs ont été maudits. Les bureaucrates n'ont plus eu à  connaître quoi que ce soit ou avoir un semblant de sagesse ; tout ce qu'ils avaient à  faire était de se fier à  quelques nombres arbitraires. Et maintenant vous me dites que vous faites cela pour déterminer qui va au paradis ?

Saint Pierre : Oui, c'est beaucoup plus simple. Peu importe si vous avez été gentil ou avez fait de votre mieux ou avez bien travaillé ou avez été pieux ou modeste ou généreux. La seule chose qui compte c'est de calculer si vous avez eu un gros impact.

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