La science, la cité

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Mot-clé : confiance

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Concertation et dialogue science-société, un contre-exemple

Non non, le contre-exemple en question n'est pas celui des OGM, dont le débat parlementaire a été évité au profit d'un décret passé par le gouvernement. Le cas dont je vais vous entretenir est passé beaucoup plus inaperçu dans les médias nationaux... Il s'agit d'un projet de centrale géothermique dans la région de Bâle : dans le cadre du programme suisse "Deep Heat Mining", ce projet vise à  fournir de l'électricité et du chauffage aux ménages de l'agglomération de Bâle, grâce à  l'énergie disponible à  5000 mètres de profondeur.

© Geopower Basel AG

Le premier forage, exploration préalable à  l'exploitation, a été achevé en octobre 2006. Et le 8 décembre dernier, de l'eau injectée en profondeur provoquait un séisme de magnitude 3,5. Un séisme d'origine humaine, donc, dans une région qui a connu par le passé quelques séismes de très grande ampleur et qui possède une industrie chimique très sensible.

Localisation du séisme

Voilà  notre premier acteur, la science et la technologie. Mais la société n'est jamais loin. En fait, la population surprise ignorait tout du projet : les experts avaient calculé que les secousses seraient à  peine sensibles et que seuls les autorités et les médias devaient être prévenus. Quatre répliques qui se sont produites entre le 15 décembre et le 2 février dernier, de magnitude comprise entre 2,5 et 3,3, leur ont donné tort et ont conforté les habitants dans l'idée qu'on leur a caché quelque chose d'importance…

D'autant que la ville de Bâle est frontalière avec la France (Haut-Rhin) et l'Allemagne (Baden-Wurtemberg), et que ces deux pays qui ont aussi fortement ressenti les secousses n'ont pas eu leur mot à  dire dans le projet. Un exemple flagrant que les interlocuteurs des experts (en l'occurrence les autorités) sont rarement superposables aux populations concernées, et suivent une toute autre rationalité (droit national ou cantonal vs. espace géographique européen ou consommateurs locaux vs. population plus large concernée par les nuisances).

Alors, qu'aurait-on pu faire ? Etablir un dialogue avec la société civile, co-construire le projet de forage et non pas communiquer pour reconquérir l'opinion publique comme l'affirme un membre du conseil d'administration de la société Geopower Basel AG. A priori, les habitants seraient sans doute favorables à  un tel projet, à  condition qu'ils aient voix au chapitre dans la transparence la plus totale.

Aujourd'hui, la balle est dans le camp des entrepreneurs, qui ont interrompu momentanément leurs activités et ont commandé un rapport d'experts. Et, acculée et avec un peu de retard,

La société d’exploitation Geopower a reconnu que la technologie utilisée était encore assez peu connue et qu’elle nécessitait des recherches approfondies. Les autorités bâloises reconnaissent, de leur côté, avoir sous-évalué les risques.

Selon le journal municipal local Ludovie, la Présidente du Gouvernement de Bâle reconnaît que les informations concernant ces travaux ne sont pas parvenues à  la population, ni aux autorités de nos voisins. Aujourd'hui, nous devons admettre qu'il s'agit là  d'une erreur, nous acceptons la critique concernant cette manière de procéder.

Et pour montrer que le problème se répète encore et toujours, citons le Directeur de l'Institut de veille sanitaire à  propos d'une toute autre affaire : pour que la confiance vis-à -vis de l'expertise soit réelle, il faut associer le plus en amont possible la société civile. Associer, et pas seulement communiquer vers

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Politique et science en Suède

Puisque l'exemple de la Suède revient sans arrêt dans la campagne des présidentielles en France, arrêtons-nous un instant sur la situation des relations entre science et politique là -bas. Et ce grâce à  un rapport de 2006 dont le résumé en anglais est paru le 2 janvier dernier. Ce travail de l'association "Vetenskap & Allmà¤nhet" (VA), qui s'intéresse au dialogue entre science et société, nous apprend (après avoir interrogé près de 600 députés et politiciens) :

  • les politiciens sont plus optimistes et enthousiastes vis-à -vis de la science que le grand public, comptant notamment sur elle pour contribuer à  la croissance économique (83 %) et à  la lutte contre le réchauffement climatique (78 %) ;
  • les politiciens, surtout ceux de droite, ont aussi plus confiance dans les chercheurs (du public surtout, du privé un peu moins) que le grand public ;
  • pourtant, dans les revues officielles des partis politiques, la science est d'abord présentée sous l'angle des risques (cf. figure ci-dessous) ;

  • comme attendu, les politiciens affirment que les politiques dans les domaines de la santé et de l'énergie/environnement sont celles où les résultats scientifiques influent le plus (cf. figure ci-dessous) ;

  • par contre, ce sont les recherches en sciences humaines et sociales qui influent le plus sur les décisions politiques (policy proposals) ;
  • mais pas la macro-économie, qui est majoritairement jugée comme peu scientifique (surtout par les partis de gauche !) -- ceci expliquant probablement cela...  ;
  • 2 politiciens sur 3, et presque 9 parlementaires sur 10 ont cherché activement de l'information sur la science ou la recherche dans les 12 derniers mois. Ils ont en majorité trouvé ce qu'ils cherchaient mais ils voudraient avoir plus de résumés accessibles des recherches en cours (qui ne soient pas des rapports alarmistes, dont 7 politiciens sur 10 jugent qu'il n'y en a que trop !) ;
  • enfin, les politiciens jugent que les scientifiques ne communiquent pas assez avec le grand public, celui-ci étant électeur, et donc un moyen d'atteindre et d'influencer les politiciens (étonnante vision politico-centrée, mais soit) !

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Blogs scientifiques ou pseudo-scientifiques ? (2)

Un article d'opinion publié sur le site de la BBC, écrit par Richard Ladle (chercheur et responsable du Master Biodiversity, Conservation and Management à  l'Oxford University), revient sur l'explosion des blogs traitant d'environnement et constate qu'en effet, peu sont fiables. Heureusement, on constate qu'ils sont vus ainsi et représentent même, selon un sondage BBC/Reuters, la source d'information d'actualité en laquelle le public a le moins confiance.

Evidemement, le résultat de ce sondage ne suffit pas. Richard Ladle encourage les spécialistes et experts à  bloguer sur leurs thèmes favoris — rapprochant ainsi la science et les citoyens et rétablissant l'équilibre avec les blogs pseudo-scientifiques —... tout en donnant à  ces derniers deux clés pour savoir quelle confiance accorder :

  • vérifier les données : des démonstrations scientifiques solides reposent sur une information provenant de sources reconnues et disponibles librement tandis que des argumentations biaisées ou fausses sont souvent fondés sur des données de sources secondaires, voire sur aucune donnée du tout...
  • tenir compte du lexique : une argumentation boursouflée d'hyperboles masque probablement un manque de compréhension ou d'information fiable.

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